Ava fait de la politique
Deuxième saison des aventures de la douce Ava. Trois mois après sa première enquête, elle retourne sur l'île de Jersey avec pour mission délicate de se faire accepter comme consolatrice auprès de la communauté de fantômes. Pas facile quand on est une jeune fille d'à peine quinze ans, de surcroît française sur une île anglophone, timide et peu sûre de soi, de parler devant une assemblée hostile de spectres.
La première confrontation s'avère catastrophique, quelques courants de pensée chez les fantômes ne souhaitant pas que le rôle de consolateur soit tenu par une personne vivante. Certains (les naufragés de La Joséphine notamment) font comprendre à la jeune fille, de manière on ne peut plus musclée, que sa présence les gêne. Ava expérimente le tact, la diplomatie et la persuasion. Mais comment la jeune femme peut-elle concilier son devoir de consolatrice avec son enquête sur le meurtre de Douglas Lalande, un fantôme mort au XIXème siècle, et ses premiers émois amoureux avec Marco, le bel italien ?
Avec le premier tome, on pensait lire un roman sympathique, mêlant policier et fantastique, mais cette suite nous montre que, derrière la simplicité apparente de l'intrigue, se cache une jolie profondeur psychologique que Maïté Bernard conjugue avec des portraits de femmes émouvants qui éclairent quelques thèmes sur la condition féminine à travers les époques. C'est agréable de lire dans un roman pour jeunes que la femme n'est pas destinée uniquement à devenir mère et épouse, qu'elle peut emprunter des chemins de traverse. Ava prend de l'épaisseur, gagne en maturité, découvre l'amour, ses émois et ses peines. On affectionne le personnage de son protecteur le Viking Harald (lointain cousin du Hagrid d' Harry Potter) dont la présence réconfortante et les opinions la sauveront de quelques mauvais pas. Voilà une série fort, très fort attachante, le cadre est charmant, le propos est intelligent et sensible, c'est un pur délice. Pas de surenchère dans les intrigues, un rythme qui prend son temps et impose tranquillement son décor et ses personnages volume après volume. Et toujours des titres de chapitres qui révèlent un humour subtil : "Ava ne néglige pas sa dose de vitamine D nécessaire à tout être humain. Tout être humain vivant. " "Du réconfort d'avoir les dents propres."
Ava préfère se battre, Maïté Bernard, Syros, 2013.
(Ill. de couv. copyright Syros)